Delphine Dénéréaz, une artiste-textile sur son « 37 »

Marlène Pegliasco
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[Hyères] Plus que quelques heures avant l’ouverture du 37ème Festival International de Mode, de Photographie et d’Accessoires de Mode de Hyères ! Manifestation incontournable à réputation internationale, dirigé par Jean-Pierre Blanc, le Festival de Hyères vise à encourager et promouvoir le travail des jeunes créateurs dans le domaine de la mode, de la photographie et de l’accessoire de mode. Chaque année, le festival s’enrichit de nouvelles propositions artistiques et créatives offertes par la Villa Noailles et ses prestigieux partenaires. Trois concours –Mode, Photographie et Accessoires de Mode- et de nombreux prix qui récompensent les créateurs en compétition grâce aux partenaires fidèles du festival qui partagent le même engagement commun dans le soutien à la scène artistique émergente : Chanel,Première Vision, American Vintage, le 19M, les Galeries Lafayette ainsi que bien évidemment la Fédération de la Haute Couture et de la Mode. Concours mais aussi expositions, défilés et tables rondes : une 37ème édition qui s’annonce riche et éclatante, symbolisée par l’incroyable objet réalisé par l’artiste Delphine Dénéréaz. Un « 37 » totémique qui vient marquer l’empreinte visuelle de ce festival toujours plus surprenant. L’occasion de découvrir une artiste qui mêle l’art traditionnel du tissage de la lirette à une imagerie populaire ancrée dans son époque. Interview.

©Delphine Dénéréaz

Delphine Dénéréaz, pourrais-tu nous dire quelques mots sur ton parcours ?

J’ai 33 ans. Je suis originaire de Provence et j’ai fait des études de textile à La Cambre à Bruxelles où j’ai appris à tisser. Je connaissais la technique de la lirette –un tissage ancien datant de l’époque classique- qui permettait de produire des tapis, des descentes de lits, des objets usuels en fait. Mais en cours, j’ai découvert que les tisserands recyclaient leurs tissus. Cela m’a interpelé, a fait sens pour moi car les tissus sont imprégnés d’un témoignage. Ils gardent l’âme de la personne qui les a portés. Le tissu suit l’être humain de sa naissance à sa mort, il est comme une deuxième enveloppe corporelle. Puis j’ai hérité d’un métier à tisser et je me suis lancée. Je me suis installée à Marseille où je possède un atelier et j’ai également un pied-à-terre dans le Vaucluse à Vaison-la-Romaine, un lieu où j’ai grandi.

Comment décris-tu ta démarche artistique ?

Ma démarche artistique est axée sur le réemploi de textiles domestiques destinés à la poubelle ou simplement à l’oubli. Ainsi, les tissus que je récupère sont des draps, des serviettes, des nappes que des particuliers me donnent. Comme matière, j’ai donc du coton mais également du polyester que j’emploie avec d’autres matériaux comme des emballages plastiques. Cela donne des mélanges de motifs et de couleurs accessibles à tous. Je n’ai pas l’ambition d’être élitiste, je veux que mon art soit compréhensible universellement. Enfin, je m’inspire de l’art brut, de l’ethnographie, de la gestuelle. C’est assez magique.

©Delphine Dénéréaz

Vous êtes artiste invitée 2022 de la Villa Noailles. Comment se passe cette collaboration ?

J’avais déjà réalisé quelques pièces pour le shop de la Villa Noailles à Hyères quand l’équipe m’a proposé, en septembre 2021, d’être artiste invitée 2022. Ma collaboration a commencé fin 2021 à l’occasion du Festival Les Pitchouns puis tout au long de l’année au gré des divers évènements que propose la Villa Noailles. Le Festival International de Mode, de Photographie et d’Accessoires viendra clôturer cette année formidable. Je participe à une exposition textile en partenariat avec Supima qui sera visible durant le festival et jusqu’à fin novembre . Et puis, il y a ce fameux 37. Avec Marc Armand, en charge de la communication, on a réfléchi à un symbole impactant, fort visuellement et c’est ainsi qu’est né l’idée d’un chiffre comme un emblème du festival. La pièce mesure 3 mètres sur 2 mètres et c’est du tissage sur grillage. Les équipes de la Villa Noailles m’ont fourni la matière textile nécessaire. Ce travail sur grille est différent de ma pratique traditionnelle mais cela apporte une dimension plus picturale et plus libre à mon travail.

©Delphine Dénéréaz

Diriez-vous que votre pratique est un parfait dosage entre tradition et modernité ?

Oui, avec la vannerie et la céramique, le tissage est une des plus anciennes pratiques artisanales au monde et raconte ainsi l’histoire humaine. Vous pouvez retracer l’histoire d’une génération, ce que je fais en incluant dans mes œuvres des symboles, des logos. Je me nourris beaucoup de l’adolescence, de ce passage entre deux mondes dans nos vies. J’ai à cœur de laisser un témoignage de ma génération. Je m’inspire pour cela de la culture populaire. Et puis le textile a gardé en soi un côté folklorique tout en restant longtemps cantonné à l’intérieur du foyer familial. Je voulais le faire sortir de ce domaine, de son carcan. Je pense y arriver, cela me réjouit !

©Villa Noailles, Hyères

Le tissage est-il une ode à la lenteur ?

Je dirai plutôt une ode à la patience. Ce travail demande de la répétition dans le geste, une puissance temporelle. La réalisation du « 37 » a nécessité entre 20 et 30 heures de travail.

Quelle est votre actualité ?

J’ai exposé jusqu’au 8 octobre avec la Galerie Slika à Lyon dans le cadre de la Biennale de Lyon. Puis ensuite, je vais exposer dans les locaux de La Vallée à Bruxelles avec mon collectif Monstera –collectif d’artistes marseillaises composées de Bridget Low, Léna Gayaud, Opale Mirman et moi-même! Enfin, en novembre, je m’envolerai pour une résidence d’un mois au Nigeria où j’apprendrai à travailler le métal avec un artisan local afin de créer et de développer de nouveaux outils de tissage.

©Delphine Dénéréaz
©Delphine Dénéréaz

37ème Festival International de Mode, de Photographie et d’Accessoires de Mode

Villa Noailles

Montée de Noailles, 83400 Hyères

Concours du 13 au 16 octobre 2022

Expositions jusqu’au 27 novembre 2022

Plus d’informations ici

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